La cotisation sur la valeur ajoutée (CVAE) est avec la CFE, l’une des deux composantes de la contribution économique territoriale (CET).
Cette taxe est calculée en fonction de la valeur ajoutée produite par une entreprise ou un travailleur indépendant, qui en est redevable dès lors que son chiffre d’affaires atteint un certain montant.
Concernant les modalités de détermination de cette taxe, le Code Général des Impôts ainsi que la doctrine de l’administration fiscale opéraient une distinction entre les sociétés faisant partie d’un groupe d’intégration fiscale au sens de l’impôt sur les sociétés, et les autres.
Ainsi, pour les sociétés membres d’un groupe fiscal intégré, le calcul du taux effectif de CVAE tient compte du chiffre d’affaires consolidé de l’ensemble des sociétés du groupe, pouvant conduire à une augmentation significative du montant de CVAE due par rapport aux sociétés non intégrées.
Par une décision du 19 mai 2017 le Conseil Constitutionnel déclare contraire à la Constitution cette différence de traitement (décision QPC 2017-629).
Le principe d’égalité de traitement n’est pas absolu. Il a été précisé et limité depuis longtemps déjà par la jurisprudence administrative. Il en ressort que sont traités différemment des situations différentes : pour exemple, la décision n° 87-232 – DC du 7 janvier 1988 « Mutualisation de la Caisse nationale de Crédit agricole » dans laquelle le Conseil Constitutionnel s’exprime comme suit :
» Le principe d’égalité ne s’oppose ni à ce que le législateur règle de façon différente des situations différentes ni à ce qu’il déroge à l’égalité pour des raisons d’intérêt général pourvu que, dans l’un et l’autre cas, la différence de traitement qui en résulte soit en rapport avec l’objet de la loi qui l’établit »
Au cas particulier de la CVAE, les motifs de la différence de traitement étaient obscurs. Sa remise en question n’était qu’une question de temps.
Il fallait néanmoins attendre qu’une question prioritaire de constitutionnalité soit posée par un contribuable pour que le Conseil Constitutionnel se saisisse de cette discrimination.
C’est ainsi que le 19 mai 2017 sont déclarées contraires à la Constitution les modalités de détermination du taux d’imposition à la CVAE des sociétés membres d’un groupe d’intégration fiscale.
Cette décision fait suite à une décision du conseil constitutionnel antérieure (décision QPC 2016-571, Sté Layher SAS) qui sur le même fondement, avait frappé d’inconstitutionnalité l’exonération de contribution de 3% aux seules distributions entre sociétés membre du même groupe d’intégration fiscale.
Pour la CVAE, le motif d’intérêt général était légitime selon le Conseil Constitutionnel : Il s’agissait de faire obstacle à la réalisation d’opérations de restructuration visant à diminuer le montant de CVAE dû par les sociétés du groupe (« aux fins de réduire le montant de cette cotisation dû par l’ensemble des sociétés du groupe grâce à une répartition différente du chiffre d’affaires en son sein »).
C’était davantage le critère mis en œuvre, à savoir l’option ou non pour le régime d’intégration fiscale, qui posait question.
Ce dernier n’était pas en adéquation avec l’objet de la loi, car intégration fiscale ou pas, les groupes pouvaient se livrer à de telles opérations de restructuration.
Réclamez-le trop versé !
Il découle de cette décision la conséquence pratique que les sociétés concernées peuvent réclamer le trop versé de CVAE payé au titre des années 2015 et 2016. Cette décision du Conseil Constitutionnel peut ainsi être invoquée dans toutes les instances contentieuses en cours ou à venir sous réserve des règles et délais que fixe le Livre des procédures fiscales.
Esther Le Guellec et Matthieu Mraizika